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Contexte et Vision Stratégique
Depuis plusieurs décennies, la République Centrafricaine est en proie à des crises politico-militaires qui ont fragilisé les institutions de l’Etat, mis à mal les structures de base et créer une tension entre les communautés. La dernière crise, commencée en décembre 2012 et qui a débouché sur le changement de régime du 24 mars 2013, a entrainé tout le pays dans une spirale de violences sans précédent. Les affrontements entre divers groupes armés ont mis en marche une dynamique complexe caractérisée par l’extension de la violence à tous les segments de la société avec des conséquences dramatiques : tueries à grande échelle ; destruction des biens privés et publics ; déplacement massif des populations à l’intérieur et à l’extérieur du territoire national.
Dans le but de trouver les solutions en vue de mettre un terme à ce cycle récurrent d’autodestruction, s’est tenu à Brazzaville (Congo), le Forum inter-centrafricains marqué par la signature, le 24 juillet 2014, d’un accord de cessation des hostilités par les belligérants ainsi que l’acceptation par toutes les parties prenantes d’un processus de dialogues ayant pour but ultime une sortie apaisée de la crise.
C’est dans ce contexte, qu’après les Consultations Populaires à la Base organisées de janvier à février 2015, s’est tenu le Forum National de Bangui, du 4 au 11 mai 2015, à l’issue duquel des recommandations fortes ont été adoptées. Parmi ces recommandations, figure la création par les Autorités nationales des Comités Locaux de Paix et de Réconciliation (CLPR) destinés à inclure et à faire participer activement les citoyens et les communautés à la base au nécessaire travail de dialogue permanent pour la consolidation de la paix, la réconciliation véritable et le vivre ensemble.
Etant entendu que les recommandations du Forum National de Bangui constituent l’un des fondements majeurs du nouveau contrat social entre les centrafricains, il est logique qu’après le retour à la légalité constitutionnelle suite aux élections libres, démocratiques et transparentes de février 2016, le Gouvernement puisse mettre en place les Comités Locaux de Paix et de Réconciliation, un dispositif national des citoyens médiateurs de paix, de réconciliation et du vivre ensemble voulu par le Peuple.
En outre, devant les nombreux comités dits : de paix ; de médiation ; de dialogues ; de cohésion sociale ; etc. créés depuis la dernière crise, et dont certains agissent dans l’opacité la plus complète, sans une vision et des objectifs clairs, il devient urgent et indispensable, tant pour le Gouvernement que pour la Société civile, les organisations non gouvernementales nationales et internationales d’agir ensemble en vue d’instaurer une clarté, une cohérence et une efficacité des activités en matière de médiation pour la paix, de prévention et de gestion pacifique des conflits, de réconciliation nationale et de cohésion sociale.
La vision stratégique du Gouvernement est de doter la République Centrafricaine, d’ici l’année 2021, d'une architecture pérenne de paix représentative des citoyens et des communautés à la base organisée en réseau aux échelons local, régional et national, à même de gérer et de prévenir les conflits, de faciliter le retour et la réinsertion des personnes déplacées internes et réfugiées à l’étranger, d’apaiser les tensions susceptibles de menacer la paix, la stabilité, la Réconciliation et le Vivre Ensemble.
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But et Objectifs
Le but des Comités Locaux de Paix et de Réconciliation est de parvenir à l’ancrage de la culture de non-violence, de dialogues participatif et inclusif pour une réconciliation et une paix durable en Centrafrique.
De ce qui précède, les objectifs généraux visés par le dispositif des CLPR sont : la prévention et la gestion des conflits, la recherche de la paix et la réconciliation par la médiation et le dialogue. Ainsi, les CLPR serviront au quotidien de cadre d’échanges et d’actions des citoyens et des communautés sur toutes les questions liées à :
la sensibilisation et la promotion de la paix ;
la résolution et la prévention pacifiques des conflits ;
la lutte contre les actes de discrimination basée sur l’appartenance ethnique, régionale, religieuse et le Genre ;
la culture civique et le développement local basé sur le principe de mixité sociale et communautaire.
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Statut et Missions
Une fois le programme de création, d’installation et d’opérationnalisation des CLPR à terme, ces structures sont appelées à se constituer en une Plateforme Nationale des Comités Locaux de Paix et de Réconciliation autonome qui bénéficiera du statut d’Organisation d’Intérêt Public placée sous la tutelle du Ministère en charge de l’Action Humanitaire et de la Réconciliation Nationale.
Les CLPR ont pour missions d’agir au quotidien en vue d’atteindre progressivement des résultats stratégiques qui permettront à terme, l’ancrage de la culture de non-violence, de dialogues participatif et inclusif pour une réconciliation nationale et une paix durables en Centrafrique. Ainsi, les résultats stratégiques à atteindre sont (liste non exhaustive) :
la création des conditions favorables à l’enracinement de la paix par la médiation et la prévention des conflits, en agissant sur les causes qui sont à l'origine des violences entre les individus et les groupes ;
la création des conditions favorables à la résolution pacifique des conflits. A cet effet, les Comités Locaux de Paix et de Réconciliation initieront et soutiendront activement toute action tendant à faire prévaloir le dialogue comme mode de règlement de conflits entre les individus, les groupes et/ou communautés au dépens du recours à la force ;
l’organisation et l’animation des séances de dialogue communautaire et la négociation entre les parties en conflit tout en veillant à l’établissement et aux respects d’ententes locales/communautaires ou « contrat social de paix » au niveau de leurs zones d’actions respectives ;
le développement entre les individus et les groupes ou communautés de l’esprit de coexistence pacifique, du vivre-ensemble, des relations de solidarité citoyenne et de compréhension mutuelle ;
la contribution à l’action du Gouvernement, notamment en matière de réconciliation nationale, de lutte contre l’impunité, de désarmement, démobilisation, réinsertion et rapatriement (DDRR) des éléments des milices et groupes armés non conventionnels ainsi que de la lutte contre les propagandes appelant à la haine et la guerre entre les communautés ;
la contribution, au-delà de leurs activités propres, à l'émergence et à la coordination locale des réseaux d’organisations, d’associations, de collectifs et/ou de groupes d'individus qui œuvrent en faveur de la paix, de la non-violence, et plus largement travaillent à la promotion des principes et valeurs de la démocratie et du civisme ;
la promotion de la gestion/résolution pacifique des conflits, l’acceptation de la différence culturelle et cultuelle, la tolérance et le vivre ensemble harmonieux des différentes communautés du pays à travers des activités de formation, d’information et de sensibilisation qu’ils peuvent initier dans leurs zones respectives d’action ;
l’identification et la proposition de projets pertinents d’intérêt communautaire pouvant fédérer les populations, notamment les femmes et les jeunes, autour des valeurs citoyennes de mixité sociale, de cohésion nationale et de développement local.
la facilitation de la mise en œuvre de la politique, la stratégie et les plans d’action du Ministère des Affaires Sociales et de la Réconciliation Nationale, notamment son volet « Réconciliation nationale et Cohésion sociale», et ce en coordination avec les autorités locales et/ou traditionnelles.
la facilitation aux échelons local, régional et national des activités de la « Commission Vérité, Justice, Réparation et Réconciliation (CVJRR) », une fois que cette structure de justice transitionnelle recommandée par le Forum National de Bangui sera créée et rendue opérationnelle.
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Plan National de mise en place
Sous le leadership du Ministère de l’Action Humanitaire et de la Réconciliation Nationale en lien avec les autres Départements ministériels, et avec l’appui des partenaires techniques et financiers du pays ainsi que toutes les institutions ou organisations, tant nationales qu’internationales intéressées, le plan national de mise en place des CLPR est prévu pour se réaliser de manière progressive dans les limites géographiques d’un arrondissement, d’une commune, d’une sous-préfecture ou d’une préfecture.